Il n’aura pas flanché. Malgré les intimidations et menaces abjectes dont il a fait l’objet, de la part des sionistes chrétiens, les évangélistes, Karim Khan a tenu bon et sauvé la réputation de la Cour Pénale Internationale (CPI). Il a bien demandé l’émission d’un mandat d’arrêt international à l’encontre de Netanyahou, son ministre de la Défense ainsi que de dirigeants du Hamas. Sur cette liste figure aussi Yahya Sinwar, principal artisan du 7 octobre, avec lequel Netanyahou échangeait régulièrement des SMS, selon Ehud Barak. Une alliance d’intérêts convergents que seuls les plus dogmatiques font mines d’ignorer.
Les Evangélistes, pour la plupart antisémites, font tout pour parvenir à l’édification du Grand Israël, condition nécessaire et préalable à la réalisation de leur prophétie biblique, préparant le retour de Jésus comme Christ en gloire de l’Apocalypse. Non, nous ne parlons pas d’évadés de l’asile psychiatrique mais d’un courant qui pèse près de 50% de l’électorat Républicain lors des Primaires aux Etats-Unis. Ces douze « sénateurs », qui ont envoyé un courrier dont la teneur est une honte pour qui prétend être élu d’une démocratie, ne sont que la partie émergée de cet iceberg dont l’influence sur la vie politique américaine est immense. Le funeste GW Bush fut certainement le Président sur lequel ils eurent le plus d’influence, avec les résultats que l’on connait.
Si les chefs d’accusation à l’encontre de Netanyahou sont très sévères et s’il personnifie à lui seul la dérive d’Israël (c’est en 1996 qu’il devient pour la première fois Premier ministre), il n’est que le serviteur d’une idéologie : le sionisme révisionniste, une forme de fascisme, qu’il a remise à l’honneur en Israël lui faisant prendre sa revanche sur le sionisme historique des Pères fondateurs. En effet, branche dissidente cette idéologie raciste et suprémaciste est d’autant plus néfaste qu’il n’existe plus de contre-pouvoir : ni de réelle opposition interne en Israël, le parti travailliste ayant disparu ; ni de la part de l’Autorité Palestinienne qui n’est plus qu’une potiche ; ni des dirigeants occidentaux (à quelques exceptions près) qui ont fait fi de tous leurs principes pour apporter un soutien plus ou moins explicite aux exactions israéliennes dans la bande de Gaza. Que Jacques Chirac nous manque !
Non, le 7 octobre ne justifie pas tout. Les Palestiniens sont massacrés dans la Bande de Gaza depuis bien longtemps (opération plomb durci en 2008-2009, avec utilisation de phosphore blanc, guerre de l’été 2014, par exemple). Ils sont violentés et dépossédés de leur terre en Cisjordanie depuis bien longtemps aussi. Nul ne peut s’exonérer du principe de proportionnalité et du respect du droit. Israël n’est pas au-dessus des lois internationales.
Ce choc que constitueraient ces mandats d’arrêts, si la CPI suivait les réquisitions de son Procureur Général, sera-t-il salutaire ? il est permis d’en douter. En effet, le rapport de force et le fait accompli semblent être les seuls moteurs du sionisme révisionniste. Ce faisant, ses tenants se rendent non seulement coupables de crimes de guerre et/ou contre l’humanité vis-à-vis des Palestiniens mais aussi de mise en danger de la pérennité d’Israël. En effet, un Etat sans légitimité autre que le droit du plus fort s’expose à un contrecoup particulièrement violent lorsque ce même rapport de force deviendra défavorable, ce qui est inévitable, même à horizon lointain. L’Alliance avec les Etats-Unis vacille. Qu’en restera-t-il quand la population américaine aura tellement évolué que les Evangélistes auront perdu leur poids déterminant ? Israël pourra-t-il survivre sans intégration pacifique dans son environnement régional ?
Netanyahou, biberonné au sionisme révisionniste par son père, est et restera probablement dans l’Histoire comme un grand criminel de guerre et peut-être aussi comme le fossoyeur de l’Etat d’Israël ou celui qui l’aura mis en grand danger. Lui qui porte déjà la responsabilité politique et morale du 7 octobre.
