L’histoire juive a été profondément influencée par la destruction de Jérusalem par l’empire babylonien et par la conquête romaine. Il est souvent fait état dans les récits historiques juifs de persécutions et d’exil, mais on s’interroge peu sur le fait qu’il s’agit également de défaites politiques et stratégiques. Pourquoi le petit royaume de Juda s’est-il révolté contre l’empire babylonien ? Peut- être par une forme de certitude que Dieu aiderait à vaincre ? Et c’est une guerre civile entre Juifs qui a mené à l’annexion de la Judée par Rome.
Le narratif de persécutions et d’exil a conduit à percevoir ces événements sous l’angle d’un enseignement spirituel, poussant à développer des stratégies d’adaptation. C’est normal ! Toute forme de résilience commence par le sens qu’on donne à un drame vécu et ce qu’on en fait. Cependant, à la résilience devrait s’ajouter la leçon. Et la leçon est claire : des divisions internes, une méconnaissance de l’adversaire et de grosses certitudes sont les ennemis de la réussite politique et militaire.
Or, c’est précisément ce qu’Israël semble faire depuis les attaques du 7 octobre 2023 : une réponse guerrière d’une brutalité rare, sans vision ni projet, avec la seule certitude d’incarner le “peuple de la lumière” contre les ténèbres. Nous sommes en période de Hanouka, la fête des lumières, symbole de la pureté de l’âme juive face aux Hellènes durant la période hellénistique. Cependant, il est ironique de penser que le judaïsme célèbre une fête d’opposition à l’âme hellène alors que ces mêmes Grecs avaient des échanges culturels avec… des bouddhistes.
Si le peuple juif a développé une forte résilience à travers ses épreuves, les leçons de ces événements n’ont pas été pleinement apprises. L’État, qui aurait dû exister pour sauver 6 millions de Juifs de la Shoah, est désormais celui qui affame et massacre sans relâche des civils depuis plus d’un an. L’attaque du 7 octobre a au fond montré que les narratifs ne suffisent pas ; il faut des actions concrètes, écouter, comprendre, se lier. Le problème palestinien, mis sous le tapis, a explosé avec une violence inouïe lors de ce shabbat noir. La médiatisation massive des actions israéliennes restera pour des décennies, et on peut espérer que cela soit propice à une prise de conscience des leçons non apprises qui ont mené à la destruction de deux temples
