A Davos, le chef de l’ONU dénonce le recul des engagements des Etats membres

par Olivier DELAGARDE
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L’élite politique et économique mondiale réunie en grand-messe à Davos s’est fait tancée mercredi dernier lors d’un discours sans concession du chef de l’ONU António Guterres, celui-ci dénonçant le manque de collaboration multilatérale dans un « monde de moins en moins gouvernable », menacé par deux dangers existentiels : le changement climatique et l’intelligence artificielle (IA) non réglementée.

Le Secrétaire général de l’ONU s’est exprimé lors de la réunion annuelle du Forum économique mondial, un événement organisé dans les Alpes suisses où se côtoient politiques, chefs d’État et la crème de PDG des entreprises les plus importantes et les plus influentes du monde.

António Guterres s’est attaqué sans ménagement au thème du cru 2025 : « La collaboration à l’ère de l’intelligence ». Sur un ton particulièrement alarmiste, ce dernier n’a pas hésité  à affirmer « qu’il n’y a guère de preuves de collaboration ou d’intelligence et qu’il existe de nombreuses preuves de l’aggravation de nombreux problèmes dans le monde, qu’il s’agisse de conflits, d’inégalités ou d’atteintes aux droits de l’homme ».

« La guerre nucléaire n’est plus la seule menace existentielle pour l’humanité », a-t-il affirmé, évoquant la crise climatique et « l’expansion incontrôlée » de l’intelligence artificielle.

Une addiction inquiétante aux combustibles fossiles

Comparant la dépendance aux combustibles fossiles au monstre de Frankenstein, « n’épargnant rien ni personne », le chef de l’organisation internationale a martelé non sans une certaine ironie le fait que « 13 des plus grands ports du monde pour les superpétroliers, sont sur le point d’être submergés par l’élévation du niveau des mers, conséquence de la hausse des températures et de la fonte des glaces, causée essentiellement par la combustion du charbon, du pétrole brut et du gaz naturel ». Puis de constater le ton grave, qu’un certain nombre d’institutions financières et d’industries reviennent sur leurs engagements en matière de climat. Ainsi dit : « Il s’agit d’une décision à courte vue qui, paradoxalement, est égoïste et va à l’encontre du but recherché. Vous êtes du mauvais côté de l’histoire. Vous êtes du mauvais côté de la science. Et vous êtes du mauvais côté des consommateurs qui recherchent plus de durabilité, pas moins ».

Dans la sombre perspective d’une énième conférence des Nations Unies sur le climat (COP30) qui se tiendra au Brésil en cette fin de l’année, António Guterres a rappelé aux dirigeants du monde qu’ils devaient tenir leur promesse de produire de nouveaux plans d’action nationaux sur le climat, à l’échelle de l’économie bien avant l’événement. Mais avec quelle portée ?

Dans le leitmotiv habituel de l’organisation et devant une assemblée elle aussi habituellement stoïque, les pays en développement ont besoin d’une « augmentation des financements » pour l’action climatique a-t-il une nouvelle fois fait valoir, exhortant non seulement les gouvernements, mais aussi toutes les entreprises et les institutions financières à créer des plans de transition solides et responsables.

Les fausses et inouïes promesses de l’IA

Considérant l’IA comme la prochaine menace existentielle, une arme à double tranchant, António Guterres a également soulevé la question de cette nouvelle technologie, « car certes elle est déjà en train de révolutionner l’apprentissage, de diagnostiquer des maladies, d’aider les agriculteurs à augmenter leurs rendements et d’améliorer le ciblage de l’aide. Mais elle s’accompagne de risques profonds si elle n’est pas encadrée : elle peut perturber les économies, saper la confiance dans les institutions et aggraver les inégalités », a averti le Secrétaire général comme une prédiction inéluctable.

En effet, le Pacte mondial pour le numérique, texte intégré au Pacte pour l’avenir adopté par les États membres de l’ONU en septembre dernier, propose une « feuille de route pour exploiter l’immense potentiel de la technologie numérique et réduire les fractures numériques », avec une vision commune de l’IA au service de l’humanité, et non l’inverse.

« Malgré les défis, les Nations Unies ne cesseront jamais d’exiger la paix en s’appuyant sur la Charte des Nations Unies, le droit international et les principes de souveraineté, d’indépendance politique et d’intégrité territoriale des États », a-t-il ainsi prévenu.

La réforme des institutions, de l’architecture financière mondiale au Conseil de sécurité des Nations Unies, est selon le chef de l’ONU, une nécessité car les systèmes de gouvernance sont souvent mal équipés pour faire face aux défis actuels.

« Mais la réalisation de ces changements essentiels, auxquels les dirigeants mondiaux se sont engagés lors du Sommet de l’avenir de septembre dernier, ne sera possible qu’avec une volonté politique », a-t-il déclaré, tout en lançant une mise en garde : « Je ne suis pas convaincu que les dirigeants aient compris ».

En même temps, les promesses n’engagent que ceux qui y croient..

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