Alors que les hostilités et l’insécurité se poursuivent en Syrie, notamment dans les gouvernorats d’Alep, Deir-ez-Zor, Hama, Homs, Lattaquié, Quneitra, Damas rural et Tartous au cours de la semaine écoulée, faisant incessamment de nombreuses victimes parmi les populations civiles, près de 60.000 réfugiés sont toutefois retournés dans le pays depuis le 8 décembre 2024.
Selon le Haut-Commissariat de l’ONU pour les réfugiés (HCR), il s’agit principalement de réfugiés rapatriés des pays voisins tels que le Liban, la Jordanie et la Turquie.
L’agence onusienne estime que plus de 419.000 réfugiés syriens (26 % d’hommes, 28 % de femmes et 46 % d’enfants) sont de retour en Syrie depuis le début de l’année, selon un récent décompte datant du 29 décembre dernier. La majorité de ces syriens ont regagné Ar-Raqqa (25 %), Alep (20 %) et Deraa (20 %).
Toujours selon les analystes du HCR, un million de réfugiés syriens effectueront un retour dans leur pays d’origine d’ici juin 2025. Leur nombre est estimé à six millions dans le monde, dont la moitié sont encore réfugiés en Turquie.
Près de 486.000 déplacés intérieurs sur la route du retour dans leur région d’origine
Par ailleurs, après le pic de 1,1 million de personnes déplacées à l’intérieur même du territoire syrien le 12 décembre, près de 486.000 ont retrouvés leur région d’origine à la date du 27 décembre. Ce sont désormais plus de 664.000 personnes qui se déplacent à nouveau à travers le pays depuis un mois, principalement dans les villes d’Idleb et d’Alep.
Plus au nord-est de la Syrie, quelques 25.000 déplacés intérieurs sont toujours réfugiés dans plus de 180 centres collectifs d’accueil, et ce dans des conditions déplorables de grande précarité sanitaire.
Néanmoins selon le groupe de coordination et de gestion des camps (CCCM), près de 12.000 personnes ont déjà quitté les camps de déplacés dans le nord-ouest de la Syrie depuis le 3 décembre, soit une augmentation de 4.000 personnes depuis la mise à jour de la semaine dernière. Sans qu’il ne soit possible avec certitude de connaitre les destinations finales.
Ces derniers développements sur les mouvements de populations interviennent alors que les hostilités n’ont de cesse, frappant une nouvelle fois avec densité le 27 décembre dernier le village d’Al-Bogeleyyah à Deir-ez-Zor, à environ un kilomètre des bureaux de l’ONU, affectant gravement une station d’eau dans le village de Theban.
Deux jours plus tôt le 25 décembre, un technicien intervenant afin de rétablir la distribution d’eau potable aurait été tué à la suite d’une nouvelle attaque ciblée contre la station de pompage d’Al-Khafsa, dans le gouvernorat d’Alep.
Inlassablement, les incursions israéliennes dans le gouvernorat de Quneitra se répètent
Face à cette situation et non sans un continuel dépitement, le Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l’ONU (OCHA) note que l’approvisionnement en eau de la ville d’Alep à partir de cette station d’Al-Khafsa, est suspendu depuis le 28 décembre.
En outre et comme si la situation n’était pas assez dramatiquement critique, les personnels humanitaires observent « une augmentation notable de faits criminels », s’agissant notamment de détournements et d’enlèvements dans certaines parties d’Alep et des zones côtières au cours de la semaine dernière.
Plus au sud de la Syrie, les incursions israéliennes ont visé le gouvernorat de Quneitra. Le 25 décembre, au moins six civils dont trois enfants, auraient été blessés lorsque les forces israéliennes ont ouvert le feu sur des manifestants à Al-Suweisah, ainsi dans la ville de Big Duawaya.
« Ces informations sont issues de sources locales, mais les victimes n’ont pas été vérifiées par l’ONU. Au cours de l’incursion, les forces israéliennes auraient imposé un couvre-feu et demandé aux habitants d’évacuer la zone », précise toutefois l’OCHA.
Un envoyé spécial : Geir Pedersen espère se rendre en Syrie au début de 2025
Par ailleurs, de nouveaux points de contrôle arbitraires à Homs ont restreint les déplacements des populations en quête d’une assistance sanitaire, en leur limitant l’accès aux installations humanitaires. En outre, plusieurs manifestations dans la ville de Homs le 25 décembre ont fait des victimes, une personne aurait été tuée et cinq autres blessées, selon des sources locales.
C’est dans ce contexte que l’Envoyé spécial des Nations Unies pour la Syrie continue d’insister dans un vœu pieu, sur la nécessité d’une transition dirigée par les Syriens eux-mêmes, dans ses discussions actuelles sur la voie à suivre pour le pays. Dans sa recherche d’une solution négociée, Geir Pedersen indique avoir rencontré les autorités françaises, allemandes et russes, a souligné l’ONU lundi, relevant que le diplomate norvégien s’est également entretenu le week-end dernier avec le vice-ministre russe des Affaires étrangères, Sergey Vershinin.
Au cours de toutes ces discussions et à qui a bien voulu l’entendre, le diplomate onusien a réitéré la pertinence des principes fondamentaux de la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité de l’ONU, qui appelle à une réforme constitutionnelle, à des élections libres et équitables, et à un processus politique inclusif dirigé par les Syriens.
« Son message reste cohérent », a déclaré Florencia Soto Niño-Martinez porte-parole de l’ONU, aux journalistes lors d’une conférence de presse depuis New York. Ajoutant que l’émissaire de l’ONU espère également se rendre en Syrie au début de l’année prochaine.
Une stratégie génocidaire israélienne millimétrée, là aussi
En raison d’une réelle instabilité et d’une situation sécuritaire particulièrement périlleuse du fait des agissements de Tsahal, les opérations humanitaires restent suspendues dans les régions d’Alep, de Deir-ez-Zor, de Lattaquié et de Tartous. Les expéditions humanitaires de Damas vers la ville de Qamishli dans le gouvernorat d’Al-Hasakeh ont également été temporairement interrompues, les risques pesant sur les personnels humanitaires étant trop importants.
Selon l’OCHA, l’insécurité permanente et les attaques imprévisibles, ont également gravement affecté la scolarisation des enfants dans les zones rurales de Hama, Lattaquié, Quneitra et Tartous, ainsi qu’à Deir-ez-Zor où plus de 20 écoles ont été vandalisées, pillées voir totalement détruites.
À Alep, le barrage de Tishreen n’a pas fonctionné pendant 20 jours consécutifs après avoir été volontairement et sciemment endommagé par les hostilités du 10 décembre, privant d’eau et d’électricité au moins 413.000 personnes à Manbij et à Kobani.
Outre l’insécurité persistante liée aux frappes sporadiques et néanmoins ciblées des forces armées israéliennes, la Syrie est bien entendu confrontée à une grave crise économique et humanitaire. Face aux promesses des nouveaux maîtres du pays, les membres du Conseil de sécurité ont d’ores et déjà fait part de leurs préoccupations croissantes concernant les liquidités financières, le déclin des services publics, y compris l’eau et l’électricité, ainsi que la flambée des prix des dérivés du pétrole et des transports.
En parallèle d’hypothétiques discussions politico-diplomatiques, 50 tonnes de fournitures médicales pour le nord-ouest
Selon l’OCHA, il est donc urgent et évident pour le commun des mortels, de remettre en état les infrastructures notamment les routes, les réseaux électriques et les installations de services publics. En attendant quelques perspectives diplomatiques, l’ONU et ses partenaires continuent de fournir une aide dans la mesure où les conditions de sécurité et de logistique le permettent.
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a ainsi coordonné le pont aérien humanitaire de l’Union européenne (UE), qui a permis de livrer 50 tonnes de fournitures médicales vitales, notamment des kits de chirurgie traumatologique et des médicaments essentiels, aux établissements de santé du nord-ouest de la Syrie.
À Deir-ez-Zor, Mayadeen et Tabni, le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) a réussi à éliminer plus de 4.000 tonnes de déchets solides et 5.000 tonnes de débris, créant ainsi 370 emplois d’urgence.
Plus de 1,7 million de personnes à travers la Syrie ont reçu de l’aide sous forme de pain au cours du mois dernier. Au total, plus de 265.000 personnes ont reçu des rations alimentaires et des repas chauds.
Les vraies questions et plus qu’urgentes sont : et après ? jusqu’à quand ?